Au regard de l’article que nous avions précédemment rédigé (disponible ici) qui visait à rappeler les conditions posées par le Code de la Santé Publique concernant la publicité dans le secteur de la prothèse auditive et face à l’émergence de nombreuses publicités (en boîtes aux lettres mais également sur les réseaux sociaux et internet) diffusées par les professionnels du secteur, publicités qui ne respectent en rien le code précédemment cité, nous souhaitions ajouter quelques éléments de bon sens dans ce nouvel article.

Petite définition de la publicité

La publicité fait partie intégrante du développement d’une structure professionnelle, avec le positionnement de l’offre, son prix et son réseau de distribution. Le marketing utilise l’outil bien connu des 4P « Product, Price, Promotion, Place » pour synthétiser cet aspect moderne de l’interaction entre l’offre et la demande, ayant pour but de se distinguer de ses concurrents. Le Larousse définit la publicité comme « l’activité ayant pour but de faire connaître une marque, d’inciter le public à acheter un produit, à utiliser un service (…) ensemble des moyens et techniques employés à cet effet. »

On reconnait donc plusieurs objectifs à la publicité :

  • Un objectif de notoriété, par la répétition de la publicité l’association entre la marque et le produit est ainsi martelée aux prospects sur autant de supports de communication que la marque / l’enseigne peut s’offrir et qui sont pertinents au regard de sa « cible » ;
  • Un objectif de positionnement, qui vise à positionner la marque / l’enseigne par rapport à ses concurrents dans l’esprit des prospects ciblés ;
  • Un objectif de vente (le principal). Il peut prendre la forme d’une collecte de données sur le prospect intéressé, que la marque / l’enseigne recontactera par la suite ou la forme d’une vente immédiate, toutefois impossible dans le cas de la prothèse auditive traditionnelle qui suppose un bilan auditif, une ordonnance médicale et un ajustement de la prothèse sur l’audiogramme du patient. La fonction première de la publicité est bien d’inciter à l’achat et c’est pour cette raison qu’elle se veut particulièrement agressive, cherchant avant tout non à refléter une réalité mais bien à entrer en résonnance avec les aspirations des prospects, aspirations qui, généralement, tournent autour de la volonté d’obtenir le meilleur produit (ou celui réputé comme tel), au meilleur prix (quitte à tomber dans une arnaque).

Bien qu’elle soit encadrée par de nombreuses lois, la publicité est libre. Dans ses bonnes pratiques, elle doit être loyale, véridique et saine ; elle ne doit pas dénigrer, tromper, induire en erreur ou nuire. La publicité doit être identifiée comme telle en portant la mention « publicité » ou « communiqué ».

La publicité dans le secteur de l’audioprothèse

L’association européenne des audioprothésistes (dont l’UNSAF est membre fondateur) a adopté le code européen de 1988 en la matière, code qui précise que :

« L’audioprothésiste qui souhaite faire de la publicité doit : (1) s’imposer à ne pas employer des termes ou des phraséologies susceptibles de provoquer des espérances illusoires auprès du public (2) s’abstenir d’affirmer une exclusivité de produit, de méthode ou de service qui ne soit pas réel dans les faits ou qui ne soit pas démontrable objectivement (3) éviter toute publicité qui puisse créer une image négative de la surdité (4) éviter des symboles, des phrases, des dénominations, des marques qui puissent être mal interprétés et ainsi déprécier la profession et le monde médical ou encore prêter à équivoque au niveau du public (5) l’indication éventuelle du prix des appareils sera soumise à la législation nationale en vigueur. »

Dans le cadre de la convention avec l’assurance maladie, la publicité réalisée par les audioprothésistes doit respecter les bonnes pratiques suivantes :

« les fournisseurs s’interdisent de faire pression sur les assurés au moyen de colportage, par des ventes itinérantes, des ventes de démonstration, des ventes de démarchage et par correspondance (Code de la santé publique), ainsi que par des procédés destinés à drainer une clientèle au moyen de dons de toute sorte, par des pressions auprès des organismes sociaux, ristournes aux praticiens sous quelque forme que ce soit, ou en se substituant aux médecins par la pratique illégale de l’audiométrie clinique (…) L’audioprothésiste a la faculté d’informer les assurés sociaux sur la nature de son activité ; cette information doit présenter un caractère général précisant essentiellement son lieu d’exercice et le type de matériels qu’il délivre. » Sont notamment interdits « les procédés destinés à drainer une clientèle tels que les offres promotionnelles de toutes sortes y compris une proposition d’essai gratuit d’aides auditive, les propositions de dépistage ou bilan auditif ; le publipostage et la distribution de flyers ou dépliants qui constituent un démarchage illicite lorsqu’ils contiennent une incitation à se rendre sur les lieux de vente par la promesse d’un avantage quelconque. » Il est également à préciser que « la loi interdit l’annonce d’un prix, qui va de pair avec la remise d’un devis normalisé. »

Qu’en est-il vraiment ?

Nous avions déjà évoqué les nombreux flyers reçus en boites aux lettres, nous incitant à venir « tester notre audition » (cf. article précédemment cité), mais c’est aujourd’hui la pluralité d’annonces publicitaires en ligne, ne respectant pas la loi (nous rappelons que la loi prévaut sur toute convention) et incitant le prospect en erreur qui nous motive à prendre la plume.

Quelques exemples :

Exemple de démarchage en boite aux lettres de l'audioprothésiste Amplifon, publicité interdite par la loi

Démarchage d’Amplifon en boite aux lettres (récurrent).

 

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Idéal Audition, qui s’affranchit (brillamment) de toutes les règles en vigueur en termes de publicité et qui fait donc usage de cette dernière pour afficher un prix (interdit et faux) pour orienter préférentiellement le prospect sur un dispositif auditif de classe II (dont le prix est librement fixé par l’audioprothésiste et qui ne fait pas partie du panier RAC0 sans reste à charge).  Nous évoquions déjà les dérives probables du RAC 0 dans notre article précédent, publié en novembre 2018 et disponible ici).

Mais encore…

Meilleure Audition, qui en fait de même, promouvant en visuel des appareils auditifs de Classe II (sans les nommer), visant à induire visuellement le prospect en erreur en lui promettant que ces derniers lui seront vendus pour 0€ dans le cadre de la réforme du RAC0. Ce genre de mensonge, bien sûr, s’arrête dès que le prospect a posé le pied en boutique : on lui explique alors que « sa perte auditive ne lui permet pas des produits de Classe I » ou que « la taille de son conduit auditif ne lui donne malheureusement pas accès à un dispositif intra-auriculaire » (sic.)

On en profite également pour citer AudiBene « l’expert en aides auditives modernes qui ne vous coûtent rien » (sic2), « expert n°1 de l’audition en ligne », qui laisse ainsi croire au prospect qu’il n’aura pas à se déplacer (impossible puisque l’appareil auditif doit être ajusté et que la loi l’exige) et qui fait usage des mêmes pratiques que Meilleure Audition – à savoir promouvoir des visuels d’appareils auditifs de Classe II (sans les nommer), visant à induire visuellement le prospect en erreur en lui promettant que ces derniers lui seront vendus pour 0€ dans le cadre de la réforme du RAC0. Si AudiBene ambitionne de récupérer l’ensemble des données personnels des prospects via des questions ciblées, on se demande encore – au vu des avis utilisateurs vérifiés – ce que deviennent les base de données ainsi récoltées.

À bon entendeur !

 

 

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