aide auditive analogique numérique et évolutions

La correction de l’audition à l’aide d’appareils auditifs a longtemps été assurée par de simples appareils auditifs sur lesquels il n’était possible que d’ajuster grossièrement la courbe de réponse en fréquence (réglage des sons graves) ainsi que le niveau maximum retransmis par l’appareil auditif. Il n’était évidemment pas question d’agresser l’oreille par des sons qui auraient été potentiellement dangereux. Ces systèmes étaient basiques et ne respectaient pas la physiologie d’une oreille dégradée.

Les avancées technologiques dont ont profité les appareils auditifs ont permis de prendre en compte l’évolution des connaissances sur la physiologie de l’oreille pathologique, les anciens appareils auditifs dits « à trimmer » s’ajustant à l’aide d’un tournevis ne permettant pas de gérer un nombre de réglages suffisant. De ce fait, il y a quelques années, les appareils dits « programmables », utilisant une console ou un ordinateur, sont arrivés sur le marché. Le nombre de paramètres accessibles devenait alors suffisant.

Les études réalisées sur la sonie ont montré que pour une oreille pathologique, la progression de la sensation sonore était, en particulier sur les atteintes neurosensorielles, plus rapides que pour une oreille saine. Les cellules ciliées externes étant touchées, elles ne peuvent plus jouer leur rôle d’amplificateur sur les sons faibles. Par contre, les sons fort sont perçus normalement. La dynamique se trouve donc réduite, il y a phénomène de recrutement. Les circuits de compression à large gamme dynamique (WDRC) ont donc été mis au point afin de compenser ce recrutement. Les circuits WDRC ont pour caractéristique principale de pouvoir modifier en permanence et automatiquement le gain de fonction du niveau sonore et ce sur une plage très importante allant des sons faibles jusqu’aux sons forts. Leur utilisation s’est d’abord faite de manière uniforme sur toutes les fréquences, puis différenciée sur les graves et les aiguës. La présence de ces deux canaux étant indispensable car le recrutement est rarement identique sur toutes les fréquences. En respectant mieux la physiologie de la cochlée, les appareils auditifs sont devenus moins agressifs.

Mais la réalisation de circuits plus sophistiqués imposait de passer de la technologie analogique à celle du numérique.

Qu’appelle-t-on appareil auditif analogique et numérique ?

L’appellation analogique vient du fait que, tout au long du cheminement du signal électrique issu du microphone, il est possible de retrouver ce signal, certes modifié, mais toujours sous la forme d’un courant électrique présentant les mêmes caractéristiques de forme. Le signal est amplifié grâce à des transistors. D’une manière imagée, le faible courant provenant du microphone commande une vanne (base du transistor) qui libère un fort courant, envoyé dans l’écouteur. Les transistors ne sont pas parfaits. Ce qui implique que plus un circuit analogique est complexe, plus le signal qui le traverse est dégradé, amenant son lot de distorsions. La limite s’impose d’elle-même.

Par contre, la technologie numérique (ou digitale) fait référence à un codage chiffré du courant électrique provenant du microphone. Ces valeurs sont ensuite modifiées par des équations mathématiques (algorithmes) puis retransformées sous forme de courant électrique à l’entrée de l’écouteur. Les grandeurs ont changé de forme durant le trajet. Il n’y a plus d’analogie. Les possibilités de modification du signal ne dépendent plus que de la puissance de calcul de la puce, ainsi que de la qualité de conception des algorithmes. Les possibilités deviennent infinies.

aide auditive analogique numérique et évolutions

Qu’apporte le numérique par rapport à l’analogique ?

En 1996, avec l’arrivée du numérique, les appareils auditifs deviennent « intelligents ». Il leur est possible de détecter la présence d’un bruit constant et de baisser automatiquement le gain. Le confort dans le bruit devient une réalité concrète pour leurs utilisateurs d’appareils auditifs. Tous les progrès qui viennent, à partir de 1996, en matière d’appareils auditifs, sont dus au développement de cette technologie.

Appareil auditif numérique et pertes auditives neurosensorielles ?

Les appareils auditifs numériques prennent en compte le recrutement de l’oreille en généralisant l’utilisation des circuits WDRC. En multipliant le nombre de canaux de compression indépendants, on va améliorer la sélectivité fréquentielle. Ces appareils auditifs sont donc bien adaptés à la correction des pertes neurosensorielles. La gestion de la dynamique des sons pour chaque zone fréquentielle permet une adaptation personnalisée très précise. Le malentendant retrouve une sonorité qu’il qualifie de naturelle.

Appareil auditif numérique et voix faible ?

Dans les appareils auditifs numériques, le bruit de fond a notablement été réduit. L’utilisation de compressions WDRC permet d’amplifier beaucoup plus les niveaux faibles. De ce fait, ces appareils auditifs permettent une perception accrue des voix faibles. Dans le cas d’acouphènes, cette meilleure correction des sons faibles va permettre de le « noyer » plus facilement dans le bruit ambiant.

Appareil auditif numérique et qualités acoustiques ?

Dans les circuits numériques, il y a une volonté de procurer une qualité sonore irréprochable en toutes circonstances. Les algorithmes sont écrits en ce sens. De plus, le son est contrôlé afin de ne jamais entrer dans une zone de distorsion (en particulier pour l’écouteur, qui reste l’élément le plus critiquable). Ce point est très important car la présence de distorsions va dégrader le confort pour la personne, ainsi que la discrimination dans le bruit.

Appareil auditif numérique et tolérance aux bruits ?

La multiplication des canaux interdépendants de type WDRC rapides et de haute qualité acoustique, associés à des circuits limitant le niveau maximum à l’entrée et à la sortie, vont permettre un contrôle de son tel que l’accoutumance à l’amplification devient facile et rapide. En effet, la majorité des personnes adaptées en numérique portent dès le premier jour leurs appareils auditifs dans des ambiances sonores variées, sans ressentir de gênes marquées. Ce n’était guère le cas avec les appareils auditifs analogiques. Les circuits modernes contrôlent en permanence et automatiquement les gains mis en jeux, le réglage de volume accessible à l’utilisateur devient donc inutile. De ce fait, les aides auditives sont beaucoup plus simples d’emplois et ne se dérèglent pas. L’équilibre stéréophonique est conservé.

Appareil auditif numérique et performances dans le bruit ?

Cette meilleure tolérance au bruit ne devant pas se faire au détriment de la compréhension, les concepteurs d’appareils auditifs vont développer des stratégies afin de favoriser la perception de la voix malgré la présence de bruit. C’est sur ce critère que les fabricants peuvent se différencier. Les progrès suivants vont porter sur des systèmes très élaborés.

Les progrès permis par la technologie numérique

Ils sont pluriels : réduction du bruit ambiant, renforcement spectral, microphones directionnels actifs, système anti-Larsen efficace, reconnaissance de la situation. Détaillons-les dès à présent.

Réduction du bruit ambiant

« Pour que la parole puisse être mieux perçue dans le bruit, il suffit de réduire le bruit. »

Cet adage a été rendu réalisable à travers une prothèse auditive, grâce à la mise au point de systèmes réducteurs de bruit efficaces. Ceux-ci utilisent une analyse correspondant aux règles de phonétiques et de psychoacoustiques, mettant en œuvre une intelligence artificielle pour reconnaitre la présence de la parole dans le bruit. Il est possible de détecter la parole en analysant la modulation du signal dans le temps. Une modulation importante répétée avec des intervalles de temps brefs (300ms) la caractérise. Des algorithmes contrôlent alors les paramètres des différents canaux WDRC afin de baisser le bruit présent entre les éléments pertinents de la parole. De fait, celle-ci parle dans ce cas de contraste temporel.

Renforcement spectral

Une oreille dégradée voit ses courbes d’accord s’élargir. La sélectivité fréquentielle diminue. Ceci induit une diminution de l’émergence des pics formantiques. On dit que le contraste spectral est réduit. Grâce à une transformée rapide de Fourrier, il est possible de l’analyser et d’augmenter brièvement le gain dans les canaux correspondant aux pics de formants (première approche), ou de réduire les creux (approche actuelle).

La première approche a tendance à rendre le son agressif et à être de ce fait mal tolérée. La dernière approche conserve un son doux et naturel tout en ayant augmenté le contraste de la voix.

Microphones directionnels actifs

Les microphones directionnels sont utilisés depuis très longtemps dans les appareils auditifs. Le but étant de focaliser la captation des sons situés devant, alors que les sons arrière sont défavorisés. Il en résulte que les bruits ambiants omniprésents sont atténués alors que la voix de l’interlocuteur, se trouvant généralement en vis-à-vis, va être mieux captée. Il y a donc amélioration du rapport signal sur bruit. L’émergence de la voix dans le bruit est, de ce fait, améliorée, car le rapport signal / bruit est meilleur.

Le principe est intéressant, mais les anciens microphones directionnels étant peu efficaces, ils furent peu utilisés.

Fort heureusement, des progrès substantiels ont été réalisés dans ce domaine. Les fabricants ont eu l’idée d’associer deux microphones omnidirectionnels afin de les rendre directionnel. D’une part les performances se trouvent accrues et, d’autre part, les caractéristiques de directivité sont modifiables par le processeur lui-même en mixant différemment les deux microphones constitutifs. La captation des sons peut donc être omnidirectionnelle ou directionnelle en fonction du programme choisi (ambiance calme ou bruit). Il est même possible d’aller encore plus loin en changeant le diagramme polaire de captation, passant de manière continue d’omnidirectionnel, cardioïde, super cardioïde, jusqu’à bidirectionnel, l’appareil auditif devenant alors capable de suivre le déplacement d’un bruit important passant derrière (par exemple, une moto) et d’annuler la perception de ce bruit. Il suffit, pour cela, de caler électroniquement l’axe de sensibilité minimale des microphones sur la source du bruit. Ce système déjà présent sur certains appareils est très efficace (la précision de poursuite est de l’ordre de 2 à 3 degrés). Certains modèles d’appareils utilisent trois microphones alignés. L’effet directif devient alors très marqué.

Les microphones directionnels et les réducteurs numériques du bruit ont chacun des effets bénéfiques sur l’amélioration du rapport signal / bruit. Ils sont donc complémentaires.

Système anti-Larsen efficace

Un problème souvent mis en avant par les porteurs d’aides auditives est le problème du Larsen. Le phénomène du Larsen est bien connu et correspond à un rebouclage acoustique entre la sortie de l’écouteur et l’entrée du microphone. Il se traduit par un sifflement intempestif perçu par le malentendant et son entourage. Traditionnellement, plus le gain est important, plus les fuites doivent être réduites. Par contre, il est crucial de limiter au maximum le phénomène d’autophonie. Il est dû au fait d’obturer le conduit auditif par l’appareil. Dans le cas de bonne conservation des fréquences graves (cas très fréquent), il est indispensable de décompresser le conduit auditif externe par un évent. Ce qui ne manque pas de provoquer un Larsen. En fait, fréquemment un compromis entre le gain et le confort doit être trouvé. Heureusement, des systèmes de plus en plus efficaces voient le jour afin de lutter contre ce phénomène d’instabilité acoustique qui pénalise l’appareillage en dégradant confort et efficacité. Ces systèmes anti-Larsen peuvent se regrouper en deux familles :

  • Famille des filtres réjecteurs : lors de la détection de la présence d’un Larsen, le système va mettre en place un filtre mobile qui va éliminer la bande de fréquence très étroite (filtre notch) où se situe ce Larsen ;
  • Famille des mises en opposition : lors de la détection de la présence d’un Larsen, le système va réinjecter à l’entrée un signal correspondant au Larsen, mais en opposition de phase afin de l’éliminer.

Ces deux principes permettent de gagner une dizaine de décibel de gain avant l’apparition du sifflement caractéristique du Larsen. La détection étant constamment active, le système s’adapte automatiquement aux modifications d’environnement (mise en place d’un chapeau, téléphone, etc.). Ils sont qualifiés d’anti-Larsen « adaptatifs ».

Reconnaissance de la situation

Tous les systèmes précédemment cités ne sont pas à utiliser tout le temps, dans toutes les circonstances. Tel système sera utilisé dans telle circonstance, avec tel réglage de paramètres, ce qui n’est plus vrai dans telle autre circonstance. Par exemple, le mode directionnel sera utilisé dans le bruit, alors que dans le calme c’est l’omnidirectionnel qui sera choisi, etc.

Le fait que l’utilisateur puisse choisir entre deux programmes (« calme » et « bruit ») est déjà très intéressant. Ce qui est encore mieux, c’est que l’appareil auditif reconnaisse lui-même la situation sonore présente et gère ses systèmes internes sans intervention du malentendant.

Les appareils auditifs préconfigurés

Nouveaux venus sur le marché, les appareils auditifs préconfigurés de qualité (norme CE et autres caractéristiques techniques déjà évoquées dans cet article) bénéficient de ces nouvelles technologies. Dotés de composants électroniques qualitatifs, préréglés par des médecins avec des algorithmes pointus, dotés d’une courbe d’amplification fine, ils intègrent une réduction active du bruit ambiant et une adaptabilité immédiate à l’environnement sonore. Ces appareils auditifs, intra-auriculaires ou contours d’oreille, sont des solutions de pointe pour les personnes presbyacousiques qui, pour des raisons qui leurs sont propres, rejettent l’appareillage auditif traditionnel.

 

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