implant cochléaire

Introduction : l’implant cochléaire

La surdité totale est une infirmité dont on mesure mal l’énorme retentissement psycho-affectif et socio-professionnel. En outre, chez l’enfant, malgré les efforts des rééducateurs, la surdité totale entrave considérablement le développement du langage et de l’intelligence. L’implant cochléaire permet de pallier partiellement ce handicap auditif. Le professeur CHOUARD et son équipe sont parmi les premiers ayant contribué à développer sa technique, qui a vu le jour à Paris en 1957 grâce à EYRIES. Dès 1973, cette équipe a pu objectiver la supériorité de l’implant multi électrodes dans la discrimination des fréquences élevées puis dans l’intelligibilité de la parole. En 1976, ils ont mis au point le premier implant multicanal portable. En 1982, ils ont démontré chez le cobaye que l’implant prévenait l’atrophie des noyaux cochléaires déclenchée par une surdité totale réalisée dès la naissance, pourvu que cette stimulation électrique soit appliquée avant un âge critique correspondant chez l’enfant à environ 4 à 6 ans. Progressivement 15 ans d’expérience leur ont permis d’établir un pronostic per-opératoire des résultats de cette réhabilitation et, à partir de là, de proposer pour les moins bons cas, la mise en place d’un implant cochléaire monocanal, peut être aussi efficace pour ces patients que ne l’aurait été un implant multi canal, plus cher, plus sophistiqué et plus encombrant, ce qui les a amenés à définir et mettre au point deux implants, l’un multi-électrodes l’autre mono-électrode. Il existe de nombreux implants cochléaires disponibles pour le chirurgien. Nous résumerons leurs avantages et leurs inconvénients, puis les exigences de leurs indications.

Rappel physiologique

Les vibrations sonores sont des phénomènes mécaniques transmis par le tympan et les osselets aux liquides de l’oreille interne. A ce niveau, réparties sur toute la longueur du tube cochléaire, se trouvent, épanouies comme un éventail, les fibres du nerf auditif. A l’origine de chacune de celles-ci se trouve l’organe de Corti, dont la fonction est de transformer les vibrations mécaniques de ces liquides en signaux électrophysiologiques qui vont parcourir les fibres nerveuses vers le cerveau. Sur cette sorte de clavier cochléaire, la répartition topographique des fibres conditionne leur spécificité fréquentielle.

L’implant cochléaire est un système électronique implanté qui permet de donner ou de redonner une certaine audition aux personnes atteintes de surdité totale, c’est-à-dire ne tirant aucun bénéfice des prothèses auditives traditionnelles. On s’est aperçu, en effet, que 90% de ces surdités totales étaient dues, non pas tellement comme on le croyait jusque-là, à une destruction du nerf auditif mais avant tout à une disparition totale de l’organe de Corti, cet organe sensoriel qui, dans l’oreille interne, transforme les vibrations mécaniques des sons en signaux électrophysiologiques que seul le nerf auditif peut recevoir et transmettre. Cette conservation des fibres auditives est certes partielle. Mais en court-circuitant l’organe de Corti défaillant et en envoyant directement à ces fibres auditives restantes l’information sonore préalablement transformée en signaux électriques convenables, on peut redonner une certaine audition à ces patients.

Les différents implants cochléaires

Un implant cochléaire comprend un système émetteur porté dans la poche et un système récepteur implanté chirurgicalement sous le cuir chevelu et relié au voisinage des fibres auditives par une ou plusieurs électrodes. L’émetteur transforme les sons de la parole en signaux électriques dont l’énergie et le codage sont envoyés à travers la peau par ondes électromagnétiques au récepteur, grâce à une petite antenne portée sur l’oreille et dissimulée dans les cheveux. Le geste chirurgical est simple, analogue par exemple, à une tympanoplastie.

La stimulation électrique des fibres auditives peut se faire de deux manières, globale ou sélective. Une électrode unique baignant dans les liquides, va stimuler globalement l’ensemble des fibres et ne donner qu’une information sonore frustre, car la discrimination des fréquences ne pourra dépasser 500Hz. Plusieurs électrodes réparties sur le clavier cochléaire vont, au contraire, apporter une information fréquentielle sélective, au total bien plus riche. Les implants cochléaires monocanaux n’ont qu’une électrode. Ils fournissent une information limitée aux fréquences inférieures à 500Hz environ. Ils sont peu encombrants et donnent une bonne information sur l’environnement sonore et notamment le rythme de la parole. Mais leur efficacité sur la discrimination de celle-ci sans l’aide de la lecture labiale est quasiment nulle au regard de celle apportée par les implants cochléaires multicanaux.

Les implants cochléaires multicanaux comportent une quinzaine d’électrodes placés sur l’éventail fréquentiel de la cochlée. Ils sont capables d’apporter des informations allant jusqu’à 4000Hz. Ils sont donc plus efficaces, plus chers et plus volumineux que les implants cochléaires monocanaux.

implant cochléaire

Indications

Il faut distinguer la décision de mettre en place un implant cochléaire et le choix de celui-ci.

Quand proposer un implant cochléaire ?

Un implant cochléaire peut être proposé chez un patient souffrant d’une surdité totale bilatérale, ne tirant aucun avantage des prothèses auditives conventionnelles ou préconfigurées et présentant encore un certain nombre de fibres nerveuses auditives. Pour s’assurer de la présence de ces restes nerveux, un test de stimulation électrique de la fenêtre ronde (SEFR) est indispensable. Il confirme que le patient est capable de recevoir des informations sonores et apporte des éléments quantitatifs permettant d’apprécier le pronostic de la réhabilitation. Mais en outre la motivation et l’environnement du sourd total doivent être de qualité, car la compréhension aux sons nouveaux apportés par un implant cochléaire nécessite un effort comparable à celui demandé pour apprendre une langue étrangère. Par contre, ne sont pas des contre-indications l’existence d’autres handicaps associés au handicap auditif. De même, ne sont pas des contre-indications une oreille multi-opérées, une infection latente, une cochlée ossifiée, des bourdonnements intenses (acouphènes).

Chez l’adulte, l’indication concerne essentiellement les sujets atteints de surdité acquise, qu’elle qu’en soit la cause (traumatisme, antibiotiques, etc.). Les sujets atteints de surdité congénitale en relèvent également mais avec circonspection, car ces derniers sont généralement bien installés dans leur handicap et qu’il n’est pas toujours bon de modifier complétement leur façon de vivre. Par conte chez l’enfant, la mise en place de l’implant cochléaire doit être décidée le plutôt possible, dès qu’est certaine la surdité totale. Cette certitude comprend, outre diverses épreuves audiométriques, l’essai pendant quelques mois du port de prothèses auditives classiques pour être certains de l’inefficacité de celles-ci. Ainsi, en pratique, ce n’est pas avant l’âge de 2 ou 3 ans que cet implant cochléaire peut être mis en place. Pourtant il est indispensable que ce geste soit effectué le plus rapidement possible. Nous avons montré, en effet, que chez l’animal l’implant cochléaire pouvait empêcher l’atrophie des formations auditives centrales déclenchées par une destruction néo-natale des deux cochlées, pourvu que cette implantation ait lieu avant une date critique, qui correspond, chez le jeune enfant, toutes choses égales par ailleurs, à l’âge de 5 ou 7 ans environ.

Le choix de l’implant cochléaire

Théoriquement, s’il n’y avait pas de contre-indication d’ordre financier, l’implant cochléaire multi canal devrait être proposé dès que l’indication est envisagée. Cependant, les résultats du test SEFR permettent de prévoir les bons cas, qui manifestement relèveront d’un implant cochléaire multi canal et les mauvais cas dont les performances, même avec un implant cochléaires multi canal ne dépasseront qu’à peine celles qui seraient obtenues avec un implant cochléaire mono canal. Dans ces derniers cas, il est licite de proposer simplement un implant cochléaire mono canal, un peu moins cher, moins encombrant et finalement presque aussi efficace.

Résultats

Les résultats sont très satisfaisants, même si la réhabilitation de l’audition reste rudimentaire au regard d’une audition normale. La réinsertion dans le monde sonore est immédiate. L’amélioration de la lecture labiale est considérable. L’intelligibilité de la parole varie avec les patients. Elle dépend de très nombreux facteurs et on peut la prévoir avant l’intervention chirurgicale. Dans certains cas exceptionnels on peut même obtenir une intelligibilité au téléphone. Mais même dans les cas chez lesquels cette intelligibilité reste faible lorsqu’elle ne s’aide pas de la lecture labiale, les transformations psychologiques et l’amélioration dans les relations sociales sont toujours spectaculaires.

Chez l’enfant, le développement du langage, de l’intelligence et les progrès scolaires obtenus après l’implantation expliquent l’intérêt que les rééducateurs d’enfants sourds portent depuis peu à cette technique. Néanmoins, les parents d’enfants sourds doivent cependant bien comprendre que l’implant cochléaire ne fait que transformer leur enfant sourd total en un enfant qui restera toujours un sourd partiel appareillé. Celui-ci ne sera jamais un enfant à audition normale. Après l’implantation, les efforts de rééducation auditive et orthophonique devront être continués avec autant d’assiduité qu’ils avaient été jusque-là entrepris et ils devront être poursuivis jusqu’à l’adolescence.

Les échecs de l’implant cochléaire se rencontrent surtout chez les patients atteints de surdité congénitale. Il s’agit d’une déception conduisant au refus de porter un appareil auditif estimé trop visible au regard de la désillusion de ne pas tout entendre comme des sujets normaux. Mais ces échecs peuvent être prévenus à l’aide d’une information per-opératoire et d’une sélection sévère dans les indications de cette réhabilitation.

implant cochléaire

Prothèse auditive tactile pour sourds profonds : nouvelle génération

Le canal auditif des sourds profonds et totaux est trop diminué pour transmettre la parole même très amplifiée. Par ailleurs, l’ambiguïté des mouvements labiaux ne permet pas d’obtenir une compréhension satisfaisante avec la lecture labiale seule. Pour la compléter, différentes aides ont été étudiées. Que ce soit pour les implants cochléaires, pour l’utilisation des restes auditifs dans les basses fréquences, ou pour la stimulation d’un sens de substitution (vue ou toucher), le problème est toujours le même : trouver un mode de représentation des informations qui soit accessible au sourd.

De nombreuses études ont été réalisées, mais les résultats restent limités, c’est pourquoi la génération actuelle de systèmes tactiles se concentre sur l’idée d’une aide tactile à la lecture labiale et délaisse le projet plus ambitieux d’une prothèse tactile totale et indépendante.

En essayant de prévoir les technologies de demain, on peut imaginer le profil de la nouvelle génération de prothèses tactiles pour sourds et s’y préparer.

Description du problème

La structure d’une prothèse peut se décomposer en 3 modules :

  • Le traitement automatique de la parole (TAP)

Un module d’entrée qui traite le signal sonore pour en donner une image simplifiée ou plus adaptée. Plus le traitement automatique de la parole est puissant, plus le signal de sortie est simple et facile à reconnaitre par le malentendant.

  • Le stimulateur

Un module de sortie qui stimule le sens choisi (électrodes, écouteurs, diodes, vibreurs plus ou moins nombreux).

  • Le codage

Un module intermédiaire qui code la sortie du premier module en dimensions existant sur le module de stimulation. L’adéquation entre les stimuli tactiles proposés et les possibilités perceptives du sens du toucher est le facteur fondamental de la réussite. Une bonne connaissance du récepteur tactile ne suffit pas si on ne se donne pas les moyens de l’exploiter grâce à un traitement du signal adéquat.

Historique des recherches

L’évolution des recherches dans ce domaine est directement liée à celle des technologies. Après la première prothèse auditive électromagnétique conçue par Bell, qui déboucha sur l’invention du téléphone, Gault fut le premier à explorer la voie tactile. Peu après, la visualisation de la parole grâce au sonogramme donne des espoirs pour les solutions visuelles. Mais c’est aussi à ce moment qu’on réalise la complexité du signal de la parole et de son décodage. Dans les années 50, les nouvelles possibilités électroniques (filtres) redonnent de la vigueur aux études tactiles qui aboutirent à quelques appareils commercialisés (avec un ou deux vibreurs) et de nombreux prototypes de laboratoires. Vingt ans plus tard, l’avènement de la micro-électronique permet la réalisation des premiers implants cochléaires et d’importantes prothèses tactiles portatives. Actuellement, le domaine des sciences de l’information vit un essor avec l’apparition des puces de traitement du signal qui multiplie considérablement les possibilités, de la prothèse numérique à la reconnaissance de la parole. Cela explique le regain d’activités dans chaque branche, tactile compris.

Situation actuelle

De nombreuses études sont effectuées à travers le monde, les produits commercialisés n’étant pas toujours représentatifs de l’effort de recherche engagé. Les types d’appareils développés peuvent être classés comme des implants cochléaires :

  • Les monocanaux : nombreux à être commercialisés, bon marché, petits, robustes, mais dont les résultats sont très limités ;
  • Les multicanaux : beaucoup sont encore dans les laboratoires car les résultats, malgré une sensible amélioration par rapport aux monocanaux, sont encore trop faibles relativement à leurs coûts et à la gêne qu’ils provoquent.

Nouvelle génération

Les limites des meilleurs appareils actuels permettent de dégager 3 problèmes majeurs :

  • Le signal qui stimule la peau est trop complexe ;
  • La stimulation n’utilise pas les potentialités de la perception tactile de façon optimale, car elle dépend trop du signal généré par le TAP ;
  • L’apprentissage nécessaire pour utiliser ces prothèses est trop long.

Que nous apportera demain en termes de solution pour ces personnes difficilement appareillables ?

 

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