les pratiques commerciales des audioprothésistes, interdites par la loi

Devant la multiplication[1] dans la profession de pratiques et de publicités non conformes au regard des dispositions de la convention, les caisses primaires en partenariat avec le Syndicat National des Audioprothésistes Français (UNSAF) ont décidé de rappeler les règles applicables en la matière.

Le Code de la Santé Publique, qui régit la profession d’audioprothésiste, détermine les conditions d’exercice et prohibe strictement certaines pratiques de vente :

• Art. L. 4361-1. Est considérée comme exerçant la profession d’audioprothésiste toute personne qui procède à l’appareillage des déficients de l’ouïe. Cet appareillage comprend le choix, l’adaptation, la délivrance, le contrôle d’efficacité immédiate et permanente de la prothèse auditive et l’éducation prothétique du déficient de l’ouïe appareillé. La délivrance de chaque appareil de prothèse auditive est soumise à la prescription médicale préalable et obligatoire du port d’un appareil, après examen otologique et audiométrique tonal et vocal.

• Art. L. 4361-7. La location, le colportage, les ventes itinérantes, les ventes dites de démonstrations, les ventes par démarchage et par correspondance des appareils de prothèse auditive sont interdits.

La Convention Nationale conclue, entre les caisses d’assurances maladie et le Syndicat National des Audioprothésistes Français, fixe, en son article 3 les limites dans lesquelles la publicité peut être réalisée :

« Les fournisseurs s’interdisent de faire pression sur les assurés au moyen de colportage, par des ventes itinérantes, des ventes dites de démonstration, des ventes par démarchage et par correspondance (Code de la Santé Publique), ainsi que par des procédés destinés à drainer la clientèle au moyen de dons de toute sorte, par des pressions auprès des organismes sociaux, ristournes aux praticiens sous quelque forme que ce soit, ou en se substituant aux médecins par la pratique illégale de l’audiométrie clinique, conformément à l’arrêté du 2 mai 1973 (J.O du 18-5-1973). L’audioprothésiste a la faculté d’informer les assurés sociaux sur la nature de son activité ; cette information doit présenter un caractère général précisant essentiellement son lieu d’exercice et le type de matériel qu’il délivre. »

Sans que cette liste soit exhaustive, sont donc strictement interdits les procédés suivants :

• Les propositions de bilan auditif : L’audioprothésiste ne peut en effet intervenir qu’en exécution d’une prescription médicale et un bilan auditif ne peut être réalisé que par un médecin. En effectuant un bilan auditif l’audioprothésiste se substitue au praticien et peut être poursuivi pour pratique illégale de la médecine ;

Pourquoi est-ce interdit ? Car « nul ne peut être juge et parti » : il y a conflit d’intérêt. Un audioprothésiste vend des prothèses auditives, il ne peut donc pas être neutre dans la réalisation du bilan auditif, au risque de majorer la perte auditive pour vendre une prothèse auditive plus onéreuse. D’autre part, il ne dispose pas des compétences nécessaires pour réaliser un bilan auditif, c’est au médecin ORL de réaliser l’audiogramme.

• Les essais et les prêts d’appareil sans prescription médicale préalable : La délivrance de chaque appareil de prothèse auditive est soumise à la prescription médicale préalable et obligatoire du port d’un appareil, après examen otologique et audiométrique tonal et vocal qui est de la seule compétence du médecin ;

• Les opérations de publipostage (par mailing) et les distributions de prospectus, nominatifs ou non, qui constituent un démarchage illicite dès qu’elles contiennent une incitation à se rendre sur les lieux de vente par la promesse d’un avantage quelconque (cadeau, gratuité, remise…) ;

Pourquoi est-ce interdit ? Un audioprothésiste a le droit de faire connaître son point de vente et ses services, en revanche aucun avantage quelconque ne doit inciter à l’achat d’un appareillage auditif (seule une prescription ORL le peut) et le choix d’un audioprothésiste plutôt qu’un autre ne doit être arbitré qu’en fonction des devis et d’une rencontre humaine et non d’une quelconque offre commerciale.

• L’affichage de tarifs non personnalisés par des sites Internet ou sur tout autre support de communication (courriers, prospectus, flyers…) qui constituent des prix d’appels trompeurs et une forme de devis sans prescription et sans examen de la situation du patient ;

• L’annonce de manifestations de type  « journées d’information » ou  « journées techniques » qui constituent des ventes dites de démonstrations lorsqu’elles s’adressent à des prospects et ne sont pas préalablement autorisées par les autorités compétentes (ARS, CPAM…) ;

• Les offres promotionnelles, qu’elles soient ponctuelles ou renouvelées : les annonces de remises « pour 1€ de plus » ou  « x% » ou  « accessoire offert »…) sont des  « dons de toutes sortes » faisant pression sur les assurés ;

 

Pour rappel, l’article 8 de la convention des Audioprothésistes stipule :  « En cas de non-respect par l’une des deux parties de ses engagements conventionnels, la commission paritaire régionale doit être réunie (…). La commission paritaire régionale, après audition de l’intéressé, émet un avis sur la décision à prendre à son encontre et qui peut-être selon la gravité de la faute :

  • Un avertissement,
  • Une mise en demeure,
  • Le retrait du bénéfice de la procédure de dispense d’avance des frais.

En outre, les organismes peuvent demander au fournisseur défaillant le reversement des sommes indûment perçues. (…) »

Je vous prie d’agréer, Madame, Monsieur, l’expression de ma considération distinguée.

Le Président, Gilles LEBLANC, Le Vice-Président, Jean-Jacques VIVET

 

{ MODIFICATION DU 18 JANVIER 2019 } Suite à la réception du courrier d’un lecteur.

Le 9 Janvier 2019, notre lecteur se rend dans une grande enseigne d’audioprothésistes car il a reçu « une invitation à faire un bilan auditif gratuit ». Vous trouverez, ci-dessous, le bilan auditif réalisé par l’audioprothésiste. Cet audiogramme montre un patient atteint d’une surdité sévère, avec une perte auditive conséquente sur les fréquences aigues (jusqu’à 80dB sur l’oreille droite et 70dB sur l’oreille gauche) ! En d’autres termes : un patient qui n’entend rien et qu’il faut appareiller sur les deux oreilles. Afin que la Sécurité Sociale et la mutuelle prennent respectivement en charge son appareillage auditif, notre lecteur est invité à se rendre chez un ORL : l’audioprothésiste prend RDV pour ce monsieur.

Le 16 Janvier 2019 (8 jours plus tard), notre lecteur se rend donc à son RDV chez l’ORL qui, consciencieux, refait le bilan auditif du patient. L’audiogramme réalisé par le médecin ORL montre un patient qui entend très bien et qui n’a nullement besoin d’un appareillage.

À bon entendeur !

 

 

[1] L’Assurance Maladie vous informe – Message de la Commission Paritaire Régionale des Audioprothésistes concernant les règles de publicité. CPAM du Calvados.

 

 

2 Commentaires

  1. MATHIEU Suzanne

    10 juillet 2020 à 20 h 03 min

    Bonjour,

    Un audioprothésiste m’a envoyé un courrier avec sa publicité. je ne connais pas cet audioprothésiste, seul le médecin ORL a pu lui donner mes coordonnées En a t il le droit ?
    Merci
    Cordialemennt

  2. Julie

    2 août 2020 à 16 h 42 min

    Bonjour,
    Le médecin n’a aucunement le droit de vendre, de louer ou d’échanger – contre un quelconque service – sa base de données. Cette pratique est formellement interdite.
    Il n’est pas rare, également, que des agences de communication peu scrupuleuses s’exonèrent de la loi RGPD et revendent leurs bases de données aux professionnels. Il est donc tout à fait possible que cet audioprothésiste ait fait l’acquisition d’une base de données segmentée par âge / sexe / ville, afin de pouvoir envoyer sa documentation. Dans ce cas, l’agence agit de manière illégale et l’audioprothésiste aussi. Pour faire simple, vous ne devriez pas trouver de publicité pour des bilans auditifs ou des dispositifs médicaux dans votre boîte aux lettres. Excellente journée à vous.

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